Oui à une année blanche !

 Alors que notre pays est confiné depuis près de sept semaines, alors que les annonces et mesures gouvernementales se multiplient dans tous les domaines, force est de constater que la Culture est la grande oubliée des politiques publiques d’urgence déployées.

Certes, le Ministère de la Culture a débloqué, dès le 18 mars, 22 millions d’euros pour soutenir l’ensemble des secteurs culturels mais ce n’est rien au regard des pertes déjà enregistrées ; certes la période de confinement a été neutralisée pour le calcul des droits à indemnisation des intermittents et les droits prolongés pour ceux dont la date anniversaire intervenait entre le 1er mars et le 31 mai, certes une cellule spécifique pour les festivals a été créée. Mais depuis le silence ministériel est assourdissant, lassant les structures et les professionnels dans l’expectative et l’incertitude. 

Avant même le confinement généralisé, le fonctionnement habituel des structures a été impacté par l’épidémie, les jauges ont été peu à peu réduites. Et si le pays va amorcer son déconfinement progressif le 11 mai prochain, les théâtres, les cinémas, les galeries, les centres d’art, les opéras, les musées, les salles de spectacles, les tournages ne pourront reprendre leur activité pour une durée encore indéterminée.

Depuis plusieurs jours, les professionnels inquiets se mobilisent pour faire entendre leurs voix. Les intermittents du spectacle- artistes et techniciens-, du cinéma et de l’audiovisuel réclament des mesures afin d’éviter qu’ils ne soient, à brève échéance, radiés de Pôle emploi faute d’avoir pu réaliser leurs 507 heures annuelles. Car s’il leur a été impossible d’exercer leurs métiers durant le confinement, il est tout aussi certain qu’ils ne pourront reprendre leurs activités après le confinement et ce jusqu’à nouvel ordre. Enfin, le retour au fonctionnement habituel des structures culturelles les employant, sans limite de jauge, ne pourra probablement pas se faire avant de longs mois. Dans ce contexte, la mise en œuvre d’une « année blanche, réclamée par l’ensemble des organisations syndicales du secteur, apparaît essentielle. Une telle disposition viserait à réexaminer les droits des intermittents en ajoutant à la période de référence habituelle de douze mois, une période de neutralisation allant du 1er mars à la reprise totale des activités. Soutenir une telle mesure marquerait dans ce contexte oh combien incertain une véritable solidarité interprofessionnelle dans cet éco-système culturel si fragile.

Sans le déploiement d’une telle mesure, seule à même de permettre au secteur culturel de se relever, le Gouvernement mettrait à mal le savoir-faire de ces professionnels, les condamnerait à la précarité, enrayerait le bon fonctionnement des structures et de facto amputerait notre pays de sa richesse culturelle et du rayonnement économique qu’elle génère.

Les mesures d’urgence ne disposent que d’une portée limitée et ne pourront à elles seules garantir la pérennité des structures et des emplois dans les mois et années à venir. Il apparaît désormais plus qu’urgent que le Gouvernement et le Ministère se mobilisent afin d’élaborer un véritable plan de sauvetage pour préserver ce bien commun qui sera assurément essentiel à la reconstruction de notre pays.

Sylvie Robert Sénatrice d’Ille et Vilaine      et       Maryvonne Blondin Sénatrice du Finistère