PROPOSITION DE LOI

relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique,

PRÉSENTÉE
Par Mme Sylvie ROBERT, Sénatrice

 

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Les bibliothèques présentent un paradoxe saisissant : intégrées dans le paysage de la cité, identifiées par la population, leurs actions et la réinvention permanente qui est la leur ne sont pas toujours appréhendées dans leur diversité. Tiers-lieu, lieu plastique, la bibliothèque s’apparente à une série de poupées russes où les savoirs, les loisirs, les services aux publics, le patrimoine se déclinent sous différentes formes, avec comme point commun la présence immuable du livre.

Premier équipement culturel en France1 , il fait l’objet d’un attachement très fort des élus locaux. Ces dernières années, la réflexion politique autour des bibliothèques et de la lecture publique s’est d’ailleurs intensifiée. Abordée sous le prisme de l’adaptation des horaires d’ouverture au public2 , et donc de l’accès au service public, elle a été aussi l’occasion d’interroger les missions moins visibles, moins « instinctives » des bibliothèques, et de modifier les dispositifs existants pour soutenir leur développement.

Parmi les évolutions récentes structurantes, il est intéressant de mentionner l’ouverture, au sein du concours particulier « bibliothèques » de la dotation générale de décentralisation (DGD), d’un soutien financier pour accompagner les collectivités territoriales qui conduisent un projet d’extension des horaires d’ouverture de leurs bibliothèques ; le renforcement des contrats territoire-lecture ; la création de la Nuit de la lecture en 2017 ; et, bien évidemment, l’augmentation substantielle du budget consacré aux bibliothèques, à travers le concours particulier « bibliothèques » qui atteint, aujourd’hui, 88 millions d’euros.

Ainsi, les travaux menés sur les bibliothèques et la lecture publique3 ne sont pas restés lettre morte. Ils ont trouvé une concrétisation politique et juridique qui doit encore être précisée et affermie ; c’est précisément l’objectif de cette proposition de loi.

En effet, si les bibliothèques territoriales font partie intégrante du code du patrimoine, elles ne sont néanmoins pas définies. De manière analogue, les principes cardinaux devant réglementer leur accès sont inexistants en droit positif, alors même que le risque de le limiter est réel. Il s’avère donc essentiel de mener à bien cet effort de définition et d’inscrire la liberté et la gratuité d’accès aux bibliothèques territoriales dans la loi. Plus globalement, il est question de déterminer et de qualifier les fondements premiers régissant ces lieux culturels, et de protéger les professionnels y travaillant, dans une perspective similaire à celle du Manifeste de l’Unesco adopté en 1994.

D’autre part, cette proposition de loi a vocation à acter les mutations des bibliothèques, dont l’évolution des missions au service de l’accès à la culture et aux savoirs, de la citoyenneté, de l’accompagnement des personnes en général, témoigne de leur vitalité, de leur créativité et de leur rôle éminemment intégrateur et civique.

À l’heure où expliquer et asseoir la prééminence des valeurs républicaines de notre Nation s’avère nécessaire, les bibliothèques favorisent l’exercice de la liberté, de l’esprit critique, des droits et devoirs des citoyens. Elles se révèlent ainsi doublement indispensables, à la fois par l’ouverture culturelle qu’elles représentent que par l’engagement civique que, bien souvent, elles proposent.

En ce sens, l’investissement et le professionnalisme de l’ensemble des personnels doivent être salués et reconnus, tant ils sont la pierre angulaire sur laquelle repose la qualité de ce service public de proximité.

Enfin, ce texte adapte les dispositions existantes au paysage territorial afin de renforcer la politique de lecture publique. Sans faire preuve de rigidité, il s’agit de structurer plus encore l’exercice de la compétence lecture publique, tout en faisant confiance aux élus locaux qui connaissent leur territoire.

En conséquence, la proposition de loi se décompose en deux chapitres : le premier a trait à la définition des bibliothèques et des principes fondamentaux qui leur sont attachés ; la seconde porte sur le développement de la lecture publique.

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  1. 16 000 lieux de lecture, dont 7 000 bibliothèques et 9 000 points d’accès au livre.
  2. Rapport sur L’adaptation et l’extension des horaires d’ouverture des bibliothèques publiques, Sylvie Robert, 2015 et Voyage au pays des bibliothèques, Erik Orsenna & Noël Corbin, 2018.
  3. Outre les rapports précités et ceux de l’Inspection générale des bibliothèques, intégrée depuis 2019 au sein de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche, nous pouvons également citer le projet de recherche Biblidroit, conduit par Mme Marie Cornu, très instructif et utile pour la réflexion normative dont les conclusions paraîtront en 2021 sous le titre « Le droit des bibliothèques. Règles et pratiques juridiques».