Mardi 4 octobre 2016 PL Egalité et Citoyenneté Article 1er


M. le président. La parole est à Mme Sylvie Robert, sur l’article.

Mme Sylvie Robert. Dans son livre Pour une République moderne, Pierre Mendès France écrivait que la démocratie est « d’abord un état d’esprit » et qu’elle « n’est efficace que si elle existe partout et en tout temps ».

Il poursuivait en précisant que la démocratie « ne consiste pas à mettre épisodiquement un bulletin dans une urne, à déléguer les pouvoirs à un ou plusieurs élus, puis à se désintéresser, s’abstenir, se taire pendant cinq ans. Elle est action continuelle du citoyen. » Cette « action continuelle du citoyen » peut prendre plusieurs formes : organisée collectivement, elle renvoie à la société civile, qui s’évertue à influer et contrôler les affaires de l’État ; à l’échelle individuelle, elle peut être résumée par la notion d’engagement.

Tel est d’ailleurs l’objet de ce projet de loi et, singulièrement, de son titre Ier. Parmi ses principales mesures, on peut citer l’instauration de la réserve civique, la valorisation de l’expérience acquise lors de la réalisation d’un service civique ou encore la volonté de faciliter l’exercice de responsabilités associatives, ce que permettait l’article 8, malheureusement supprimé par la commission spéciale.

J’aurais aussi aimé, mes chers collègues, évoquer devant vous des expériences telles que les coopératives jeunesse de services, qui permettent à de jeunes mineurs, à partir de seize ans, de s’engager dans de véritables projets d’éducation et d’entrepreneuriat situés au croisement de la sphère économique et de l’éducation populaire. C’était un amendement d’appel, mais il a été déclaré irrecevable au titre de l’article 41 de la Constitution.

Depuis les tragiques événements qui nous ont frappés, nombreux sont ceux qui ont ressenti la nécessité de résister et de s’investir, comme en témoigne l’engouement pour la réserve opérationnelle. La solidarité est apparue comme une réponse à la barbarie ; l’engagement, comme un puissant facteur de résilience et de catharsis.

La jeunesse a réagi en manifestant son irrémédiable besoin d’agir et son envie d’engagement. Aux « déclinistes » et aux identitaires, elle apporte une réponse concrète et sans équivoque : l’engagement est une valeur partagée qui fonde notre identité collective. Ce qui crée du commun, c’est précisément cet engagement : peu importent nos différences !

M. Alain Néri. Très bien !

Mme Sylvie Robert. Toutefois, l’engagement ne se décrète pas. Il ne précède aucunement le sentiment d’appartenance à une collectivité ; au contraire, il en est une émanation. Pour cette raison, les inégalités et les fractures qui nuisent à la cohésion d’une société sont autant de causes qui freinent l’engagement.

C’est pourquoi je veux saluer ce projet de loi qui, par son titre Ier, mais aussi son titre II, consacré à la politique de mixité sociale, va pouvoir en témoigner.

En conclusion, mes chers collègues, je crois qu’il faut se souvenir que les bâtisseurs de murs ont toujours épuisé la démocratie, quand les bâtisseurs de ponts l’ont toujours fait vivre ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et républicain, du groupe écologiste et du RDSE.)

Article 14 sexies
(Non modifié)

Le chapitre Ier du titre Ier du livre VI de la troisième partie du code de l’éducation est complété par un article L. 611-10 ainsi rédigé :

« Art. L. 611-10. – Les établissements d’enseignement supérieur élaborent une politique spécifique visant à développer l’engagement des étudiants au sein des associations. »

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, sur l’article.

Mme Sylvie Robert. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, l’article 14 sexiesintroduit par l’Assemblée nationale impose aux établissements d’enseignement supérieur de mettre en œuvre une politique spécifique visant le développement de l’engagement des étudiants au sein d’associations.

Avant que ne tombe le couperet de l’article 41 de la Constitution, nous avions proposé de préciser cet article par un amendement, soutenu par le groupe socialiste et républicain, afin que cette nouvelle obligation d’initiative parlementaire n’ignore pas deux éléments importants.

Le premier est que le principal opérateur de la vie étudiante est le centre régional des œuvres universitaires et scolaires, le CROUS. Dans chacune de ses initiatives, le législateur ne doit pas l’oublier. Cette précision est d’autant plus importante que se développent, insidieusement ou non, avec ou sans la complicité des gouvernances des établissements d’enseignement supérieur de tout statut, des initiatives parfois très éloignées de l’esprit des œuvres universitaires.

Le deuxième élément est que cette mission doit être mise en œuvre par les premiers intéressés eux-mêmes, c’est-à-dire par les étudiants, comme le prévoit d’ailleurs le plan national de vie étudiante.

Ces deux points, qui ne sont pas de simples détails dans les textes, puisqu’ils en changent l’ADN, ont été jugés irrecevables au titre de l’article 41.

Nous n’aurons donc pas, mes chers collègues, de débat de fond sur ce sujet qui est pourtant tout à fait dans l’esprit de ce texte. J’espère toutefois que le Gouvernement saura mener cette discussion avec les acteurs de la vie étudiante afin que l’ambition que nous portons pour eux ne soit pas tout simplement oubliée.

Mme la présidente. Je mets aux voix l’article 14 sexies.
(L’article 14 sexies est adopté.)

 

Article 14 septies
(Non modifié)

L’article L. 714-1 du code de l’éducation est complété par un 6° ainsi rédigé :
« 6° Le développement de l’action culturelle et artistique. »

Mme la présidente. La parole est à Mme Sylvie Robert, sur l’article.

Mme Sylvie Robert. L’article 14 septies modifie les missions pour lesquelles les universités ont la possibilité d’ouvrir des services communs internes. Cet amendement vise à ajouter deux missions à celles que sont susceptibles d’exercer ces services.

La première est l’action sportive. Les établissements disposent de services universitaires – ou, parfois, interuniversitaires – des activités physiques et sportives, les SUAPS, qui jouent un rôle important dans l’accès ou le maintien d’une pratique corporelle.

Les jeunes qui quittent le domicile familial pour un logement autonome afin de suivre leurs études quittent souvent également le tissu associatif au sein duquel ils pratiquaient leur sport. La diversité de l’offre de pratiques physiques et sportives des SUAPS permet aux jeunes comme aux personnels des établissements de découvrir de nouvelles activités.

L’ajout de cette mission vise à reconnaître l’importance de ces services, en complément des associations sportives des établissements, regroupées au sein de la Fédération française du sport universitaire, la FFSU, pour la pratique sportive des étudiants.

La seconde mission que nous vous proposons d’ajouter est la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle, laquelle découle directement de la nouvelle mission de service public de l’enseignement supérieur que le Sénat avait inscrite, il y a trois ans, dans la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche, dite loi ESR.

Cette mission joue un rôle fondamental dans l’élévation du niveau de connaissance de l’ensemble des citoyens et participe du débat public sur les nombreux enjeux scientifiques en plein développement, parmi lesquels le réchauffement climatique et la transition énergétique.

La communauté universitaire, consciente de sa responsabilité sociale et environnementale, est donc engagée dans la diffusion de la connaissance auprès du plus grand nombre.

Cet ajout encouragerait les établissements à se doter de services dédiés à la diffusion de cette culture scientifique, technique et industrielle, y entraînant donc les étudiants à tous les niveaux de leur parcours, afin de leur donner des moyens à la hauteur des enjeux de leur mission.

Mme la présidente. L’amendement n° 417 rectifié, présenté par Mme D. Gillot, MM. Magner et Guillaume, Mmes Blondin, Cartron, Conway-Mouret et Lienemann, MM. Lozach, Richard, Rome, Sueur, Vandierendonck et Vaugrenard, Mme Yonnet et les membres du groupe socialiste et républicain, est ainsi libellé :

Alinéa 2
Rédiger ainsi cet alinéa :

« 6° Le développement de l’action culturelle, sportive et artistique, et la diffusion de la culture scientifique, technique et industrielle. »

La parole est à Mme Sylvie Robert.

Mme Sylvie Robert. Cet amendement est défendu, madame la présidente.